« Le Christ, pendant les jours de sa vie mortelle, a offert, avec un grand cri et dans les larmes, sa prière et sa supplication à Dieu qui pouvait le sauver de la mort ».
Ce passage de la Lettre aux Hébreux que nous venons d’entendre, résonne particulièrement à nos oreilles en ces jours où partout dans le monde nous prenons conscience de la fragilité de la vie et de notre nature mortelle. On avait évacué la mort, on pensait même pouvoir un jour la supprimer et voici qu’elle nous saute au visage paralysant toute l’économie mondiale. Or, le mystère pascal que nous célébrons en ces jours saint ne craint pas de nous confronter à la mort pour nous révéler qu’elle n’est pas une impasse mais une Pâque, un passage. Et le Christ, en sa Passion, inaugure pour nous ce chemin : « Le Christ, pendant les jours de sa vie mortelle, a offert, avec un grand cri et dans les larmes, sa prière et sa supplication à Dieu qui pouvait le sauver de la mort ».
Abandonné des siens, face à sa propre mort, Jésus ne reste pas seul. Dans son angoisse, il invoque son Père comme en témoignait sa prière à Gethsémani : « Père, s’il est possible que cette coupe passe loin de moi… Cependant, non pas comme je veux, mais comme tu veux ! » (Mt 26, 39) Ainsi, Jésus s’abandonne jusque dans sa détresse entre les mains du Père. L’auteur de la Lettre aux Hébreux précise que Jésus « a offert sa prière et sa supplication », laissant ainsi entendre que tout en exprimant son désir d’être sauvé de la mort, il s’offre en toute obéissance et confiance filiale à la volonté du Père, sans savoir comment il le sauverait de la mort. Jésus traverse sa Passion dans un dialogue et une communion constante avec son Père. Dans la nuit de la foi peut-être, mais avec cette mystérieuse assurance de demeurer son fils bien-aimé, à tel point que l’on devine le Père engagé au coté de son Fils dans ce combat face au mal jusqu’à la mort.
Et l’auteur de la Lettre aux Hébreux, poursuivant sa méditation, ajoute : « parce qu’il a été respectueux en tout, il a été exaucé ». On pourrait aussi traduire parce qu’il a été en tout point fidèle au dessein d’amour du Père pour tous les hommes, jusqu’à se laisser atteindre par leurs violence pour y manifester son Pardon, il a été exaucé. Et cet exaucement, c’est une victoire définitive sur la mort : « Ressuscité d’entre les morts, le Christ ne meurt plus » dira saint Paul. « Le dernier ennemi détruit, c’est la mort » ajoutera même l’Apôtre pour signifier que la Résurrection inaugure une libération définitive de toutes les puissances de mort.
C’est pourquoi l’auteur de la lettre aux Hébreux peut conclure par ces mots : « Ainsi conduit à sa perfection, Il est devenu, pour tous ceux qui lui obéissent, (c’est-à-dire pour tous ceux qui deviennent par leur vie donnée ses disciples) la cause du salut éternel ».
A nous d’accueillir ces paroles d’espérance et d’en être les témoins en renonçant au mal et en offrant notre vie à la suite du Christ pour vivre de Lui maintenant et à l’heure de notre Mort. Puisse la vénération de la Croix, ce soir, nous introduire à ce mystère.
frère Jean-Michel